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Le Facebook Graph Search en 6 points : une menace pour Google ?

Le 15 janvier 2013, le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg  dévoilait son moteur de recherche interne. Nommé « Graph Search », il a pour but de croiser l’ensemble des donnés de vos amis et votre réseau social afin de trouver des personnes, des lieux, des photos, des centres d’intérêts qui auront été « likés » par vos amis.

Une vidéo de présentation montre des scénarios d’usage sur la page officielle du Graph Search.

 

Si vous souhaitez voir la retransmission de la conférence de présentation (45 minutes), la voici :

Lien pour télécharger la vidéo : http://newsroom.fb.com/news/2013/01/video-of-todays-graph-search-event/

Petit pied de nez à la concurrence, lors de la conférence, Mark Zuckerberg a fait intervenir deux personnes-clés, Tom Stocky et Lars Rassmussen, qui avaient travaillé chez Google. Lars Rasmussen a rejoint Facebook fin 2010 et avait fondé la start-up qui a inventé Google Maps. Il a aussi supervisé Google Wave, qui a fait un flop, mais on va voir que le Graph Search a de beaux atouts et peut prétendre au succès.

Quel est le principe du « Facebook Graph Search » ?

Depuis la barre de tâches, Graph Search propose d’effectuer des recherches de manière « naturelle » sur des thématiques pour lesquelles vos amis ont interagi : publication de photo, Like, etc.

Imaginons que vous êtes à la recherche d’un restaurant à Paris. Vous tapez une requête du type « restaurant que mes amis ont aimé à Paris ». Facebook effectuera une recherche de tous les restaurants parisiens likés par vos amis en les classant par popularité sur le réseau social.

Les résultat seront hiérarchisés en fonction des « like » obtenus, au niveau global ou de votre réseau d’amis.

Voici des exemples de recherches liées aux endroits : les villes visitées par mes amis, les restaurants de telle ville appréciés par tel groupe d’utilisateurs, etc.

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Le « Graph Search »  déterminera  donc la pertinence d’une information en fonction du nombre de fans qu’elle possèdera dans vos amis. Les commentaires ne devraient pas, a priori, servir de source pour une recherche. On n’a en tout cas pas l’équivalent strict d’une recherche avec indexation des textes par mot-clé comme chez Google.

Des captures d’écran permettent d’avoir une idée du résultat pour une requête comme ‘trouve les photos de mes amis avant 1999″.

C’est mignon, mais plutôt gadget : les vrais enjeux sont sur d’autres requêtes pour lesquelles Facebook est moins prêt et dispose moins de contenu pour l’instant. On en reparle plus loin.

La recommandation plutôt que la proposition ?

Le positionnement de Facebook par rapport à Google est le suivant. Lorsque vous effectuez une recherche sur Google, le moteur de recherche ne vous apporte pas de réponses, mais des pages pouvant comporter une réponse satisfaisante.

Sur Facebook, les recherches vous apporteront des recommandations directement liées à la formulation (indique moi tel type d’objet, de lieu que mes amis ont aimé). Le réseau social part du principe qu’on s’appuiera sur l’expérience ou la fiabilité de nos amis pour faire des choix.

Si aucune réponse ne peut être donnée par le Graph Search, c’est le moteur Bing de Microsoft qui prendra le relais pour afficher des réponses de façon plus traditionnelle.

Les 6 forces et faiblesses du Graph Search

Les enjeux sont importants car c’est un nouveau mode de recommandation qui pourrait émerger. Seulement, à côté d’atouts réels, il y des ombres au tableau.

1. Vos amis doivent liker à tout va

D’abord, il faudra avoir dans vos amis des « serial-likeur » pour obtenir des résultats significatifs et surtout intéressants. Sans cela, les contenus proposés en réponse seront peu nombreux ou peu qualitatifs.

Par contre, il est vrai que plus vos amis interagissent avec des contenus, avec des « objets » appartenant au Graph de Facebook (les lieux, personnes, entreprises, marques, et à terme des types de produits pourquoi pas), plus la recherche sociale prend du sens et devient intéressante.

2. Un like, ce n’est pas grand chose

La faiblesse du Graph Search restera principalement celle de sa pierre angulaire, le « Like » : pour certaines requêtes, il n’a pas beaucoup de valeur en soi et servira seulement à détecter des contacts intéressants pour approfondir le sujet en envoyant un message privé par exemple.

Un like est juste un clic, ça ne raconte pas grand chose. S’il n’est pas assorti à un commentaire instructif, une page suffisamment convaincante, il manque de consistance.

3. Les requêtes dévoilées pour l’instant sont parfois « gadget »

Facebook montre qu’on peut retrouver les amis qui travaillent dans la même société. Intérêt ? Bof.

Pour l’instant, Facebook présente des requêtes plutôt ludiques (montre moi les lieux d’une ville que mes amis aiment) dont l’intérêt peut sembler mineur tant qu’on n’est pas dans l’industrie du tourisme. Facebook doit composer avec les données qu’il a pour l’instant (des millions de photos perso, des like vers des pages de photos de petits chats ou de grandes marques, etc) et amadouer le public en racontant des histoires qui touchent à l’émotion.

Mais que se passerait-il si le Graph Search permettait bientôt de rechercher un type de prestataire, un service ou trouver une recommandation d’achat sur un produit, pourquoi pas identifier des intentions d’achat avec une wishlist. Là, l’outil sera pris très au sérieux.

4. Un potentiel énorme si le Graph Search évolue vers des requêtes « commerciales »

En soi, tout est là (déjà disponible ou presque avec les évolutions des API du Graph) pour faire interagir les membres de Facebook autour de villes, de marques, d’entreprises ou de produits qu’ils pourront recommander. On peut déjà identifier des amis qui ont aimé tel film, telle société, qui ont aimé un restaurant dans telle ville, etc.

Les requêtes ne seraient plus « quels sont les amis qui vivent à Paris » comme aujourd’hui mais plus orientées vers des besoins commerciaux du type « quel est la marque de camescope que mes amis préfèrent » avant de faire un achat, ou encore « quel film qui va bientôt sortir a été liké par mes amis » pour préparer une sortie au cinéma.

Le potentiel, en tout cas sur le papier, existe dès aujourd’hui sur certains types de « requêtes » liées aux lieux, et demain sur beaucoup d’autres sujets. Cela va certainement encourager les éditeurs de sites à redoubler d’effort pour utiliser les API et applications de Facebook : afin de faire liker au départ leur page puis à l’avenir une action, un objet, un lieu en s’interconnectant avec les données du graphe de Facebook.

5. Peu de monde pour l’essayer pour l’instant

Les avis sont partagés sur les chances de succès du Graph Search. Les scénarios présentés sont limités et le service n’est en beta qu’aux Etats-Unis pour un volume d’utilisateurs limité.

Il est donc trop tôt pour prédire si Facebook Search sera un jour pratique, plus fiable ou plus rapide que d’autres sites de recommandation ciblés comme Foursquare pour les lieux de sortie par exemple.

6. De nouvelles questions sur l’utilisation et la confidentialité de vos données

Le succès du Graph Search repose sur le fait que chaque utilisateur publie un maximum d’informations plus ou moins personnelles : qu’il like des pages, publie ses photos de vacances, mentionne sa présence à tel endroit, etc.

Facebook va donc encourager ses utilisateurs à multiplier les interactions. Mais avez-vous envie de divulguer encore plus d’informations sur vos faits et gestes, en ligne ou dans le monde réel ? Quelles requêtes aideront à vous trouver ?

Facebook se veut rassurant sur la protection de la vie privée et publie une page sur la politique de confidentialité liée au Graph Search (en anglais).

« Vos paramètres de confidentialité déterminent ce qui peut faire l’objet d’une recherche. Grâce à la recherche dans le graphe, vous pouvez rechercher tout ce qui est partagé avec vous sur Facebook et les autres peuvent trouver ce que vous avez partagé avec eux, y compris le contenu rendu public. Autrement dit, les résultats sont propres à chaque personne. »

Les anecdotes ne manquent pas sur les fuites involontaires d’une information personnelle via Facebook. En d’autre termes… jetez un oeil (plutôt deux fois qu’une) aux paramètres de confidentialité si vous voulez maîtriser les informations qui circuleront sur vous sur le graphe.

Le Graph Search, quel intérêt pour les entreprises ? 

Alors que pas mal de monde (en B2B par exemple) se demandait encore en 2013 à quoi pouvait bien servir une page d’entreprise sur Facebook, et pourquoi la mettre en avant, le Graph Search va inciter à passer à l’action.

Des » like » sur vos pages devraient avoir un effet de recommandation sur les requêtes liées à votre univers (votre offre, votre métier, l’endroit où vous êtes implanté). Facebook, malmené en Bourse et cherchant à monétiser des services pour les professionnels, va logiquement proposer à l’avenir de trouver des clients et des ambassadeurs de marque avec le Graph Search.

On voit aujourd’hui qu’on peut identifier des amis travaillant chez telle société (comme avec un Viadeo ou un Linkedin), la donnée étant renseignée à partir de la fiche profil de l’utilisateur. L’origine de la plupart des données reste tout de même floue : depuis la fiche profil, depuis les datas liées au comportement en ligne ou pourquoi pas à travers les applications… un sujet pas inintéressant qui pourrait donner lieu à de nouvelles stratégies de community management.

Pour tout expliquer aux entreprises,  Facebook propose un tutoriel sur son espace studio dédié aux professionnels.

Il résume les informations que votre page d’entreprise doit contenir : adresse du site,  description dans la partie « A propos » et surtout l’adresse physique si vous avez un commerce local.

Des recommendations qui se rapprochent de celles faites pour du SEO, n’est-ce pas ?

Une menace réelle pour Google ?

Pour certaines requêtes, on préfère l’avis d’un expert à celui d’un ami. Si j’ai besoin d’une information sur la fiscalité des entreprises, je cherche sur Google. Par contre, si j’ai besoin d’identifier un cabinet d’expertise comptable… je peux être tenté de faire une recherche de recommandation sur des amis entrepreneurs ou un cercle d’utilisateurs identifié comme tel, pour leur envoyer plus tard un message personnel ou leur passer un coup de fil.

Aujourd’hui, aucun site d’envergure mondiale n’est capable de dire instantanément à chacun « quel est le plombier que me recommanderaient mes amis ». Avec Graph Search et les pages d’entreprise, Facebook serait en mesure de le faire dans un avenir proche.

Google n’en est pas loin non plus, avec la recherche personnalisée Search Plus Your World.  Le moteur a déjà commencé à personnaliser l’affichage de résultats selon les +1 de nos amis.

Mais, encore en phase d’amélioration aux Etats-Unis, ce service s’est greffé aux pages de réponse sans vraiment être réclamé par le public, et on n’en comprend pas vraiment le fonctionnement (contrairement à Facebook Graph Search, plus « clair » et où la relation d’amis fait partie du service dès le départ) . Et puis, le réseau social Google+ reste loin derrière Facebook en terme d’usage social.

Avec le Graph Search, Facebook présente un outil de recherche intéressant et prometteur. Mais il faudrait que ce moteur puisse aller au-delà des requêtes parfois anecdotiques montrées jusqu’à présent.

Qu’en pensez-vous ? Les internautes vont-ils délaisser certaines recherches sur Google pour préférer des recherches sur Facebook ?

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